Est de la RDC: Bukavu plongée dans l’incertitude après la progression de l’AFC/M23, l’ONU appelle au dialogue
En République démocratique du Congo, l’AFC/M23, soutenu par l’armée rwandaise, continue son avancée au Sud-Kivu. Après avoir pris le contrôle de l’aéroport et des zones avoisinantes, les combattants sont désormais signalés à Bukavu, la capitale provinciale.
Ce samedi 15 février à midi, la situation reste confuse et la peur domine parmi les habitants. Des crépitements sporadiques résonnent encore, bien que moins intenses qu’au lever du jour.
Dans la commune de Kadutu, des habitants affirment avoir aperçu des militaires des FARDC. C’est également là que se trouve le grand marché de Bukavu où des scènes de pillage ont été rapportées. Une partie du marché a été incendiée, mais l’ampleur des dégâts semble moindre comparée aux pillages survenus la nuit de vendredi à ce samedi 15 février.
Le calme demeure précaire dans le centre-ville. La circulation est totalement à l’arrêt. Ni voitures ni motos ne sont visibles dans les rues.
Tôt ce samedi matin, des tirs ont été entendus aux abords du camp militaire Saio ainsi qu’à la place Major Vangu, dans la commune d’Ibanda. Une forte détonation a également retenti aux environs de 8h00, non loin du bureau de la 33e région militaire.
Qui contrôle la ville ?
Difficile à dire, à ce stade, qui contrôle la ville. Olivier Kiriza Namuguka, coordonnateur du réseau des Radios et Télévisions Communautaires du Sud-Kivu et habitant de Bukavu, joint par RFI, peine lui-même à savoir exactement ce qu’il se passe dans sa ville. « Depuis hier soir, nous sommes enfermés dans nos maisons. Nous entendons des crépitements de balles par-ci par-là et durant les quelques conversations que nous avons pu avoir les frères et les amis qui sont dans la commune mère de Kadutu, ils nous ont parlé de scènes de pillages. Hier [vendredi 14 février], au cours de la journée, on a vu les militaires quitter la ville, prendre une direction à l’ouest de la ville et on s’est rendu compte qu’il n’y avait plus de policiers, ni de militaires au niveau de la ville, mais ça nous étonne qu’on entende des crépitements par-ci par-là. La situation est confuse. On ne sait pas qui contrôle la ville. Ce que nous attendons, c’est de savoir comment est la situation pour que ceux qui veulent se ravitailler en eau ou autres puissent le faire. On voudrait savoir comment est la situation et qui contrôle la ville. C’est vraiment ça la peur que nous avons », raconte-t-il.
Ainsi, dans la ville, l’incertitude domine. La plupart des habitants restent terrés chez eux. Dans certaines zones comme à Kadutu, au sud du centre-ville, quelques jeunes tentent timidement de sortir pour observer la situation.
À la frontière, aucun agent congolais n’est visible à Ruzizi 1. De l’autre côté, au Rwanda, les activités fonctionnent normalement, mais le passage était très limité ce samedi matin. Seules quelques personnes ont traversé dans les deux sens.
Certains habitants ont préféré quitter la ville de Bukavu. C’est le cas de Tatiana Mukanire à la tête d’une association de victimes d’exactions sexuelles. Elle reste pourtant en contact permanent avec ses proches et amis restés sur place : « Sur Bukavu, il y a une grande confusion parce que la population n’arrive même pas à savoir si c’est le M23 qui est là ou si c’est l’armée, si ce sont les FARDC qui sont là. C’est l’anarchie totale […] En fait, il y a des quartiers de Bukavu où les gens ne sortent pas, ils ont peur. J’ai reçu maintenant des images de l’entrepôt du PAM [Programme alimentaire mondiale] qui a été pillé et sincèrement ça va être une grande désolation pour toute la communauté et la population de Bukavu. »